Works from the 2012 exhibition
Avec Eek, l’observateur se trouve confronté à la fois à des pans entiers d’histoire de l’art, à l’histoire récente de la peinture moderne abstraite et à l’application même de la matière picturale. Quelques coups de pinceau me font penser au couplet de Fiona Rae sur Jules Olitski: « le sens de ces peintures repose sur leur structure même et les drames qui s’y jouent, les choses surgissent, tanguent, tournent, rebondissent, s’écartent du chemin, butent contre la toile mais tout cela sans effort apparent et de manière inéluctable ». Les peintures de Eek ne sont pas sans rappeler la fin des années 50 et le début des années 60 quand les gens munis de pinceaux ruisselants peignaient de grandes œuvres, des œuvres héroïques. Mais Eek ébranle cet héroïsme, ce côté macho en fabriquant des images qui parlent d’échecs, d’épuisement, qui donnent l’impression d’être vaincues, à bout. En même temps, elles permettent à l’observateur de trouver l’issue de ce cul de sac et de revenir au glamour de la peinture à l’huile. La peinture à l’huile est une matière séduisante, cela respire l’art, cela a bien l’air d’être de l’art même si souvent cela n’en est pas.
C’est la profondeur des œuvres, tant conceptuelle que graphique et même physique qui fait qu’elles peuvent se revendiquer come étant de la bonne peinture, du bon art. … Parce que tout en elles tourne autour de l’action de peindre, de faire des touches, de les effacer, de les superposer. Ce qu’il y a de fou c’est que les touches sont aussi narratives, organiques et même économes. Regardez simplement comment une touche, qui est une touche à la surface, est aussi le large pétale d’une fleur. Eek n’utilise pas souvent de traits pour dessiner les contours d’une image, il joue avec la peinture et l’absence de peinture. La peinture jaillit, coule, se dilue et ne semble pas se fixer sur la toile. Ces images liquides conduisent le spectateur à penser que la peinture est encore en flux. Tout ceci préserve les peintures de Eek de la simple représentation, de tout show-off, ou de toute prétention intellectuelle de mauvais goût.